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Extrait :
Présentation générale des Neuf chapitres et de leurs commentaires
par Karine CHEMLA
Les Neuf chapitres sur les procédures mathématiques, qui étaient appelés à devenir le "Classique (jing)" par excellence de leur discipline, prirent forme à l’époque de la dynastie Han. Les mathématiques participaient en cela d’un mouvement contemporain bien plus large, au cours duquel de multiples domaines du savoir élaborèrent des écrits qui devaient constituer leur corpus canonique pour nombre de siècles à venir. Ce fut le cas, pour n’en citer que quelques-uns, de la médecine, de l’astronomie, de la pharmacopée, de la lexicographie ou de la géographie.
Les mathématiques se révèlent donc, par l’histoire de l’organisation de leur espace d’écrits, solidaires d’évolutions culturelles qui dépassent largement leur cadre. Nous retiendrons que lire Les Neuf chapitres, c’est lire un texte qui se vit conférer en Chine un statut singulier. Nous entrons, avec lui et par les mathématiques, dans un corpus particulier de l’univers des productions textuelles de la Chine ancienne.
Les sujets qui fournissent matière aux énoncés des problèmes rassemblés dans Les Neuf chapitres évoquent les questions qui se posaient à certains secteurs de la bureaucratie centralisée, une institution dont les traits essentiels se dessinèrent, eux aussi, sous la dynastie Han.[...]
Aujourd’hui, nous pouvons saisir de manière indirecte la part du Classique mathématique qui adhère plus spécifiquement à chacune de ces deux sphères d’activités par un nouveau biais. En 1984, un manuscrit de mathématiques sur lattes de bambou, le Livre de procédures mathématiques (Suanshushu), fut découvert dans une tombe probablement scellée avant 186 avant notre ère, à Zhangjiashan, dans la province du Hubei.[...]
Par ailleurs, un écrit touchant aux mathématiques de l’astronomie et du calendrier, également composé aux temps de la dynastie Han, nous est, lui aussi, parvenu par le biais de la tradition écrite : le Classique mathématique du Gnomon des Zhou (Zhoubi suanjing), ou Gnomon des Zhou (Zhoubi).[...]
Confronter Les Neuf chapitres à ces deux témoins suggère comment sa composition a pu puiser à des savoirs, ou s’inspirer de questions, élaborés dans des contextes différents. Il n’en reste pas moins que le Classique fond l’ensemble de ces connaissances en un tout théorique. Et nous nous attacherons à son étude, dans la mesure où elle donne de nombreuses clefs pour appréhender le développement ultérieur des mathématiques en Chine et, partant, dans le monde.
En contrepoint, un autre ordre de questions restera à l’horizon de nos préoccupations au cours de ce livre. Les Neuf chapitres, nous l’avons dit, se sont vu doter du statut singulier de "Classique". Le témoignage le plus ancien qui le désigne comme "jing" se trouve être le texte que le commentateur Liu Hui rédige en préface à son exégèse, achevée en 263.
Nous nous demanderons ce que signifie, pour Les Neuf chapitres, le fait d’avoir été consacré comme "Classique". Quelles attitudes envers le texte, quelles hypothèses sur sa nature ou sur la manière dont il faisait sens, ce statut a-t-il induit chez les commentateurs ? Garder ces interrogations présentes à l’esprit peut nous prémunir contre des modes de lecture hâtives ou trop sommaires, qui verraient en cet ouvrage l’avatar d’un quelconque manuel d’école.[...]
Une fois explicitées les questions générales qui orientent notre analyse du Classique et de ses commentaires, nous proposerons, dans ce chapitre d’ouverture, une première approche de l’ouvrage.
À titre de préambule, nous fournirons tout d’abord un aperçu des sujets mathématiques abordés dans Les Neuf chapitres. Puis nous examinerons tour à tour les divers éléments qui entrent dans la composition du Classique et de ses commentaires.
Le Classique articule pour l’essentiel des problèmes mathématiques et des algorithmes qui les résolvent, dont l’exécution requiert d’effectuer des opérations sur une surface à calculer. Nous rassemblerons donc, dans un second temps, les témoignages disponibles sur ces divers aspects de l’activité mathématique (problème, calcul, algorithme), dans l’intention de préciser, autant qu’il est possible, les pratiques mathématiques concrètes dont ces éléments ont fait l’objet en Chine ancienne. Ce préliminaire doit nous donner une idée plus précise de l’activité mathématique que reflète le texte des Neuf chapitres.
Nous nous tournerons ensuite, dans le même ordre d’idées, vers les commentateurs. Liu Hui et Li Chunfeng s’attachent systématiquement à établir la correction des algorithmes énoncés par Les Neuf chapitres. Ce sont eux qui, en relation avec cette dernière activité, introduisent différents types d’auxiliaires visuels, lesquels restent totalement absents du Classique. Notre troisième partie cherchera à donner au lecteur un aperçu synthétique et concret des pratiques que les commentateurs mettent en oeuvre aux fins de l’exégèse, et tout particulièrement des objectifs et des modalités de leurs démonstrations mathématiques.
L’ensemble de ces divers développements donnera à voir comment, dans des contextes historiques distincts, se sont élaborées des pratiques et des approches différentes des mathématiques. À titre de contraste, nous conclurons ce chapitre introductif par l’ébauche d’un panorama visant à saisir la place qu’occupent Les Neuf chapitres et leurs commentaires dans le paysage de la mathématique mondiale. Ces quelques éléments laissent percevoir combien l’étude de ces textes devrait bénéficier à notre compréhension des circulations de connaissances qui ont constitué les mathématiques comme des savoirs et des pratiques internationaux.
Titre | Les neufs chapitres : le classique mathématique de la Chine ancienne 九章算术 |
Auteur | Karine CHEMLA |
Edition | Dunod |
Format | Cartonnage éditeur |
Nb de pages | 1117 |
Langue | french |
Poids | 2500g |